Génétique canine



Généralités

Lorsque l’on croise deux chiens d’une même race, on obtient des chiots qui leur ressemblent, qui présentent les caractéristiques de la race. Si, au contraire, on croise deux chiens de races différentes, nul ne peut prédire à quoi ressembleront les petits. Ceci s’explique par la génétique.
Ce que les parents transmettent à leur progéniture, c'est de l’information codée dans des unités héréditaires appelées gènes. En effet, ce sont les gènes contenus dans chacune des cellules d’un organisme qui définissent nombre de caractères comme la morphologie ou la couleur des yeux mais également d’autres paramètres moins visibles comme le groupe sanguin.
        Le génome d’un individu ou d’une espèce est l'ensemble du matériel génétique codé dans son acide désoxyribonucléique (ADN - Acide Désoxyribo Nucléique). Chez les eucaryotes, organismes qui se caractérisent par la présence d'un noyau et de mitochondries dans leurs cellules, on distingue le génome nucléaire, contenu dans le noyau et réparti sur les chromosomes et  les génomes non-nucléaires, contenus dans des organites, dont le génome mitochondrial, contenu dans les mitochondries.
        Le génotype d'un individu est la somme des gènes qu'il possède. Le phénotype, quant à lui, correspond à la somme des caractères morphologiques, physiologiques ou comportementaux qui sont identifiables de l'extérieur.
        Les gènes sont constitués d’ADN. Chaque molécule d’ADN contient des milliers de gènes. L'ADN est une molécule très longue en forme de double-hélice composée de deux brins enlacés. Chaque brin d’ADN est composé d’une succession de petites molécules que l’on nomme nucléotides. Il existe quatre nucléotides différents : l’adénine (A), la guanine (G), la thymine (T) et la cytosine (C). C’est la succession de ces quatre nucléotides selon un ordre variable qui code l’information génétique. Les deux brins d’ADN sont complémentaires. En effet, les nucléotides vont par paire : l’adénine se lie avec la thymine, la cytosine se lie avec la guanine par des liaisons hydrogènes. Ainsi, lorsque l’on trouve un A sur un brin, on trouvera un T sur le brin complémentaire.
        Les gènes : un gène est une petite partie de chromosome, situé à un endroit bien précis. Il existe plusieurs versions de chaque gène, appelées allèles. Comme chaque chromosome est en double, un organisme possède deux allèles pour chaque gène, l’un provenant de son père, l’autre provenant de sa mère. Pour un gène connu, que l’on nomme gène A par exemple, on caractérise les allèles (par un numéro par exemple) : allèles A1, A2, A3… Chaque chien possède deux allèles du gène A. Si un chien possède les allèles A1 et A3 par exemple, on écrit : A1/A3. On appelle l’ensemble des allèles d’un animal le génotype.
Si un chien possède le même allèle en double exemplaire (par exemple, génotype A1/A1), on dit qu’il est homozygote pour le gène A. Si, à l’inverse, un chien possède deux allèles différents du même gène (par exemple génotype A1/A3), on dit qu’il est hétérozygote pour le gène A.
        Les chromosomes : chaque molécule d’ADN peut se condenser sur elle-même pour former un chromosome. Tous les chromosomes vont par paire : l’un qui provient du père, l’autre qui provient de la mère. Toute l’information génétique est donc en double exemplaire. Le chien possède 39 paires de chromosomes dont une paire de chromosomes dits sexuels, c’est-à-dire qui déterminent le sexe. On nomme ces chromosomes X et Y. Si le chiot possède un chromosome X et un chromosome Y, ce sera un mâle ; s’il possède deux chromosomes X, ce sera une femelle. La formule chromosomique du chien est donc 76 XX ou 76 XY.
Chaque cellule du corps du chien possède dans son noyau un exemplaire des 39 paires de chromosomes. Le nombre de chromosomes varie selon l’espèce. Le chien possède un nombre de chromosomes supérieur à celui de l'Homme (23 paires de chromosomes) ou du chat (19 paires).

La formation des cellules sexuelles

Les cellules sexuelles contiennent un seul chromosome de chaque paire, c’est-à-dire la moitié de l’information génétique d’un individu. Lorsqu’un spermatozoïde (qui contient 50% de l’information génétique du père soit 38 chromosomes + X ou Y) rencontre un ovule (qui contient 50% de l’information génétique de la mère soit 38 chromosomes + X), cela forme un embryon qui aura 39 paires de chromosomes, chacune composée d’un chromosome paternel et d’un chromosome maternel.
Sachant que la rencontre entre un ovocyte et un spermatozoïde se fait au hasard, un même couple peut concevoir 239 × 239 soit plus de 300.000 milliards de milliards (3x1023) de chiots différents au minimum puisque ce chiffre ne prend pas en compte les remaniements chromosomiques qui surviennent aléatoirement durant la formation des cellules sexuelles. Tous ces chiots auront tous leurs gènes en double exemplaire, dont un allèle proviendra du père et l’autre allèle proviendra de la mère. En raison de remaniements chromosomiques (appelés crossing-over), le nombre de possibilités est encore supérieur.

Les caractères génétiques qualitatifs

Les caractères génétiques qualitatifs définissent une qualité, comme la couleur du pelage, la présence ou l’absence d’un caractère, le groupe sanguin… Prenons l’exemple de la couleur de la robe, noir ou chocolat, chez le Labrador Retriever. Le gène couleur de la robe, que l’on appellera le gène B, existe sous deux allèles :
l’allèle B+, responsable de la couleur noire
l’allèle b, responsable de la couleur chocolat
On appelle phénotype l’expression visible du génotype ; il s'écrit entre crochets [ ].
Si un chien possède l’allèle B+ en deux exemplaires, il est noir. Il est de génotype B+/B+ (homozygote pour le gène B) et de phénotype [noir].
Si un chien possède l’allèle b en deux exemplaires, il est de génotype b/b (homozygote pour le gène b) et de phénotype [chocolat].
Qu’en est-il pour le chien qui possède un allèle B+ et un allèle b ? Les deux allèles entrent en concurrence. C’est la couleur noire qui l’emporte, le chien qui a pour génotype B+/b (hétérozygote pour le gène B) est de phénotype [noir]. On dit alors que l’allèle B+ est dominant (on le note en majuscules d'imprimerie) par rapport à l’allèle b qui est récessif (on le note en minuscules d'imprimerie).
 Le chien de génotype B+/b est hétérozygote pour le gène B, il est de phénotype [noir] mais il est porteur de « chocolat », ce qui veut dire qu’il peut avoir, dans sa descendance, des petits de couleur chocolat (selon le génotype de l’autre parent).
L'existence d’allèles récessifs explique que des chiots couleur chocolat puissent naître de l'union de deux parents noirs. Si l’on ne savait pas que les parents étaient porteurs, cela peut surprendre. Si l’on croise deux parents hétérozygotes (B+/b, de phénotype noir), on obtient statistiquement 25% de chiots chocolat et 75% de chiots noirs. Parmi les chiots de phénotype noir, deux tiers seront porteurs de l’allèle chocolat (hétérozygotes B+/b) et un tiers sera homozygote B+/B+.

Les caractères génétiques quantitatifs

Les caractères quantitatifs se définissent comme des paramètres mesurables, par exemple la taille, l’intensité de la couleur du pelage, etc. Ce sont les plus nombreux. Chaque caractère quantitatif est déterminé, non pas par un gène unique, mais par un ensemble de gènes : on les appelle caractères polygéniques.
L’expression des caractères génétiques quantitatifs est modifiée par des facteurs environnementaux. Prenons l’exemple du poids. Génétiquement, certaines races sont prédisposées à l’obésité (Golden et Labrador Retriever, Cocker, terriers…). Les facteurs environnementaux qui influencent le poids sont principalement l’activité physique et le régime alimentaire.
Un chien génétiquement prédisposé à l’obésité restera au poids idéal si son alimentation est adaptée et que son activité physique est importante. À l’inverse, un chien non génétiquement prédisposé à l’obésité pourra être en surpoids s’il est inactif et trop nourri.
Cet exemple semble évident mais il illustre un phénomène que l’on retrouve dans de nombreuses maladies. Ainsi, les grandes races sont génétiquement prédisposées aux affections ostéo-articulaires (comme la dysplasie de la hanche ou du coude, les ostéodystrophies, …). Cependant, on peut limiter le risque d’expression de la maladie et/ou sa gravité en proposant au chien un environnement favorable, comme une alimentation équilibrée en minéraux, une activité physique modérée pendant les premières phases de la croissance…

L’héritabilité des caractères génétiques

Tout caractère phénotypique est le résultat de l’expression combinée du génotype et de facteurs environnementaux. Selon les caractères, la part de la composante génétique est plus ou moins élevée. C’est ainsi que l’on définit l’héritabilité d’un caractère : plus la composante génétique est forte par rapport aux facteurs environnementaux, plus l’héritabilité du caractère phénotypique est élevée.
Ainsi, les caractères à forte héritabilité tels que la taille ou la couleur du poil, etc. sont peu modifiés par l’environnement. On peut donc prévoir le phénotype des petits à partir de celui des parents. En revanche, concernant les caractères à héritabilité faible comme la longévité ou le comportement, il est difficile de prévoir le phénotype des petits à partir de celui des parents.
La plupart des caractères possède cependant une héritabilité moyenne.
Lorsque l’on cherche à créer ou améliorer une race, la fixation de caractères à héritabilité élevée sera plus rapide et plus durable que celle de caractères à héritabilité faible.
Par exemple, si l’on veut créer une race de chiens au pelage noir, il suffit de sélectionner des reproducteurs au poil noir et d’écarter de la reproduction les autres individus. Le résultat sera obtenu en quelques générations. À contrario, il est long et ardu d’éradiquer une tare telle que la dysplasie de la hanche dont la composante environnementale est forte. En effet, il ne suffit pas de ne sélectionner que des parents sains pour obtenir une portée entièrement indemne ; le croisement de parents indemnes permet certes de réduire l’incidence de l’affection mais pas de l’annuler.

La consanguinité

La consanguinité entre deux individus se définit comme la proportion d’allèles identiques entre leurs deux génomes. On l’exprime en pourcentage. Il est par exemple de 50% en moyenne entre frères et sœurs.
Le croisement d’individus apparentés (et donc avec un fort taux de consanguinité) est parfois recherché pour fixer un ou plusieurs caractères. En effet ce type de croisement permet d’obtenir des individus homozygotes pour de nombreux gènes, ce qui fixe les caractères.
Lorsque l’on crée une race, l’homozygotie est recherchée pour fixer les caractères propres à cette nouvelle race (couleur du pelage, couleur des yeux…).
Les inconvénients de la consanguinité sont cependant nombreux : outre l’appauvrissement génétique, l’homozygotie qui en résulte révèle des tares génétiques ou des caractères non souhaités. Par exemple, certaines maladies génétiques sont dues à des allèles récessifs. Dans une population majoritairement hétérozygote, la maladie s’exprime peu phénotypiquement. Les animaux porteurs d’un seul allèle de la maladie sont dénommés porteurs sains. Si on effectue des croisements consanguins, on augmente le risque d’obtenir des individus homozygotes pour ce gène ; ils exprimeront donc la maladie.
La consanguinité ne crée pas de tare, elle ne fait que les révéler. Pour quelques rares maladies de ce type, il existe des tests de dépistage génétique afin d'identifier les reproducteurs porteurs sains. On évite alors les croisements entre individus porteurs de l’allèle en cause, ce qui annule le risque d’obtenir des petits homozygotes et donc malades.
Des tests génotypiques sont disponibles, par exemple pour la myopathie du Labrador, la cécité nocturne du Briard ou l'atrophie rétinienne du Setter Irlandais, du Braque Allemand, du Sloughi.



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